CMJ n°10 - MAX JACOB :
TRADUCTIONS ET CRITIQUES À L'ÉTRANGER

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MAX JACOB
DANS LA LANGUE DE CERVANTÈS

En Espagne et outre-Atlantique
du vivant de l’auteur

Marie-Claire DURAND GUIZIOU*

 

Max Jacob, qui a partagé des années durant une sincère amitié avec l’un des e plus célèbres peintres d’origine espagnole du XX siècle, ne parlait pas la langue de Cervantès(1), peut-être au plus était-il capable de baragouiner en espagnol. Ses œuvres, l’œuvre poétique en particulier, seront toutefois connues et – en moindre partie – traduites en espagnol par des contemporains.

Entre 1910 et 1935, des contacts amicaux(2) et épistolaires se sont noués avec nombre d’écrivains et d’artistes (dont des peintres) d’origine espagnole ou sud- américaine qui vont intégrer les idées de l’Esprit nouveau. L’avant-garde espagnole, « la vanguardia », s’exprimera alors par bon nombre de courants littéraires qui s’affichent avec des noms suffixés en « ismos », dont le plus représentatif sera l’ultraisme (« ultraísmo »).

Parmi les Espagnols, ce sont les noms des intellectuels comme Rafael Cansinos- Assens, Enrique Díez-Canedo, Guillermo de Torre, José Bergamín, José Francés ou encore le Catalan Ramón Vinyes, qu’il convient de retenir en ce qui concerne la réception et la traduction (pour diffusion) des textes de Max Jacob en Espagne(3), dans cette première moitié du XXe siècle. Cependant, si l’on considère les œuvres intégrales, seules deux d’entre elles seront traduites du vivant de l’auteur, tandis que poèmes, conférences, ou encore la préface du Cornet à dés feront l’objet de publications dans des revues littéraires. Parallèlement, de l’autre côté de l’Atlantique, des revues argentines, colombiennes, mexicaines, vénézuéliennes, équatoriennes dirigées par des hommes de lettres fins connaisseurs de la vie littéraire française et contemporains de Max Jacob, vont également privilégier la publication d’une sélection de poèmes en fonction d’un choix qui met toujours en lumière le côté innovant de cette poésie d’avant-garde. Il faut dire que nombre de ces contemporains épris de creacionismo ou de ultraísmo(4) étaient déjà des écrivains de renom dans leur pays : poètes, dramaturges, essayistes, critiques littéraires (certains professeurs d’université), journalistes et traducteurs ; ils étaient aussi, pour la plupart, fondateurs et directeurs de revues littéraires, un détail qui a certainement facilité la diffusion de la poésie d’avant-garde française – dont celle de Max Jacob – dans les pays de langue espagnole. Beaucoup d’entre eux avaient par ailleurs eu l’occasion de séjourner à Paris durant leurs années de production littéraire. Et certains poètes, comme le Chilien Vicente Huidobro (« le plus français des poètes chiliens »), ont favorisé l’entrée des idées et des textes avant-gardistes français dans la péninsule ibérique et au-delà.

Si les poèmes recueillis dans Le Cornet à dés ont été appréciés, ce sont les concepts théoriques recueillis dans la préface du recueil et dans L’Art poétique qui seront cités en Espagne et outre-Atlantique comme l’équivalent d’un manifeste innovant en rupture avec les courants poétiques antérieurs. Le moment était propice en ce début de siècle. Il y avait alors une volonté de changement drainée par une nouvelle génération effervescente de poètes de part et d’autre de l’Atlantique(5).

Pour faire le point sur la traduction de l’œuvre littéraire de Max Jacob en Espagne et outre-Atlantique, nous nous limiterons essentiellement à la période qui couvre les quatre premières décennies du XXe siècle, années d’ébullition littéraire à Madrid, Barcelone, Séville mais aussi à Buenos Aires, Santiago de Chile ou Mexico.

LA TRADUCTION DES ŒUVRES INTÉGRALES JACOBIENNES EN ESPAGNOL

En ce qui concerne les œuvres intégrales de Max Jacob en version espagnole, on mentionnera, en tout premier lieu, celles qui ont été traduites par des auteurs espagnols durant la période allant de 1924 à 1936. Nous n’avons trouvé aucun indice de traduction d’ouvrages de Max Jacob, en espagnol, sur le continent américain, ni du vivant de l’auteur ni a posteriori.

Le premier livre publié traduit sera le Cornet à dés de la main de l’écrivain madrilène Guillermo de Torre(6). Le livre sortira sous le titre de El cubilete de dados(7) à Madrid en 1924.

Collaborateur de la revue française L’Esprit nouveau, le Madrilène de Torre fut un fervent admirateur de Max Jacob. Dans sa « noticia crítica », sorte de prologue au Cubilete de dados, il donnera une longue présentation de l’auteur et de son œuvre, s’excusant d’avoir omis certaines pages de l’œuvre – à la demande de Max Jacob, précise-t-il – qui « réprouvait le caractère pervers de ces textes ». Il intègre la brève préface de 1906 et celle de 1916. Contrairement à l’original du Cornet à dés de 1917, El cubilete de dados inclut aussi cinq textes que le traducteur appelle « relatos » (récits), et que Max Jacob a publiés dans Le Roi de Béotie (1921). Il s’agit de « La bohème durant la guerre de 1924 », « Petite crise du dandysme étudiée chez un adolescent », « Le cousin José » et « Bonnes intentions ». G. de Torre indique d’ailleurs en note que c’est pour montrer d’autres facettes de la personnalité de Max Jacob qu’il traduit ces « récits » qu’il emprunte aux revues françaises où ils avaient été publiés. De Torre s’installera en 1927 à Buenos Aires avec son épouse Norah Borges, sœur de Jorge Luis Borges et sera co-fondateur de la maison Losada. Une nouvelle édition revue et corrigée du Cubilete de dados apparaîtra en 2006 chez Losada à Buenos Aires et à Madrid(8).

Cette version espagnole du Cornet à dés de 1924 a certes beaucoup circulé dans les milieux littéraires et a traversé l’océan. Et même si elle ne voit le jour que neuf ans après la publication de l’original, certains poèmes du Cornet traduits dans le Cubilete étaient déjà connus en espagnol avant 1917 : ils avaient fait l’objet de traduction dans plusieurs revues en Espagne(9), de la main de G. de Torre, bien sûr, mais aussi de ses aînés Enrique Díez-Canedo (1879-1944) et Rafael Cansinos- Assens (1882-1964), comme nous le verrons un peu plus loin.

Le deuxième ouvrage traduit appartient au collectif Les sept péchés capitaux auquel Max Jacob a contribué avec un chapitre intitulé « La Gourmandise ». C’est Julio Gómez de la Serna qui traduira intégralement l’ouvrage collectif en 1930 sous le titre Los siete pecados capitales où l’on peut lire « La Gula » (La Gourmandise)(10).

MAX JACOB EN TRADUCTION DANS DES REVUES LITTÉRAIRES

Comme nous l’avons signalé, Max Jacob visite l’Espagne (Madrid/Tolède) en 1926, mais il connaissait la Catalogne de son ami Picasso pour y avoir fait au moins une (ou deux) incursions auparavant, dès 1913. Sa visite à la Residencia de Estudiantes de Madrid, où il se rend pour faire une conférence, donne lieu à une meilleure connaissance des milieux culturels espagnols et à des contacts avec des intellectuels. Les numéros 1 et 2 de la revue Residencia publient respectivement un compte rendu, en espagnol, de sa conférence du 5 février 1926 sur le « symbolisme oriental et spécialement la vie de Jésus » et des commentaires sur la réception de l’intervention jacobienne dans le milieu littéraire madrilène ainsi que la reproduction de quatre gouaches.

Par la suite, José Bergamín publiera et traduira, dans sa Revue madrilène Cruz y Raya, Revista de afirmación y negación (de 1933 à 1936) deux textes de Max Jacob (dont Bergamín lui-même aurait conservé les originaux)(11), à savoir « Vrai sens de la religion catholique(12) » et « Les Plaies d’Égypte et la douleur », dans les numéros 13 avril et 18 septembre 1934 respectivement.

Mais bien avant cette date et le séjour madrilène de 1926, le nom de Jacob était connu dans les milieux littéraires grâce aux revues espagnoles d’avant-garde ou encore aux quotidiens de l’époque – pour la plupart madrilènes – qui avaient publié plusieurs de ses poèmes. Nous avons pu répertorier un certain nombre de textes dans Cervantes (revue hispano-américaine), La Esfera, España, Grecia (Séville et Madrid), Ultra, revista Internacional de Vanguardia, Cosmópolis, La Verdad, Tobogán, Revista de Occidente, La Gaceta Literaria, Heraldo de Madrid, Cruz y Raya, Prometeo. Ces revues – certaines de très courtes durées – présentent le texte jacobien en traduction de la plume d’intellectuels déjà nommés : Enrique Díez- Canedo, Rafael Cansinos-Assens, José Bergamín, Guillermo de Torre, José Francés, Antonio Marichalar. D’autres encore sont avant tout écrivains et, lorsqu’ils présentent ou commentent brièvement les poèmes de Max Jacob donnés en traduction, leur nom en tant que traducteur n’y figure pas toujours. Parfois, seules des initiales nous permettent de retrouver l’auteur (G. de T. pour Guillermo de Torre ou J. F. pour José Francés, qui empruntait aussi des pseudonymes comme beaucoup d’écrivains ou journalistes de l’époque. Cansinos-Assens signait aussi Las).

L’année 1919, date de la publication de La Défense de Tartufe, – grand livre mystique dédié au peintre espagnol Juan Gris (pseudonyme de Juan José Victoriano González) –, on relève plusieurs publications dans les revues citées, comme nous allons le voir en détail. Là encore, ce sont les poèmes recueillis dans le Cornet à dés qui sont traduits.

Rafael Cansinos-Assens traduit la préface du Cornet à dés, dans la revue ultraiste Cervantes en janvier 1919 (p. 55-61), date à laquelle l’auteur sévillan(13) prendra la direction de la revue. Il soulignera aussi l’importance du poème de trois vers (japonais) appelé haiku. Dans cette même revue et toujours à la même date Cansinos-Assens publie une très brève anthologie de nouvelle littérature française intitulée « La novísima literatura francesa/Antología lírica” (p. 55-61). L’auteur a choisi d’inclure les poètes français contemporains les plus significatifs, selon un choix personnel, tout en précisant que les poèmes choisis provenaient de revues françaises telles que Nord-Sud et les deux premiers numéros de la revue parisienne Littérature. La brève anthologie de Cansinos-Assens inclut, outre Jacob, Valéry, Apollinaire, Reverdy, Tzara et d’autres. La notice bio-bibliographique de Max Jacob est pratiquement inexistante, nous la donnons toutefois en traduction(14) ; il semble que ce soit l’intérêt du poème – « La Rue de Ravignan »(15) – qui ait primé.

Max Jacob, l’humoriste espiègle, compose un poème aux tonalités baroques comme une ancienne ballade qu’il inclut dans Le Cornet à dés, l’incendie est comme une rose ouverte sur la queue d’un paon ; il s’intitule : La rue de Ravignan.(16)

Il s’agit ici du poème publié dans Le Laboratoire central (1960 : 84-85). Nous le précisons car Le Cornet à dés (1967 : 79) inclut également un poème intitulé « La rue de Ravignan ».

Cette même année, la revue La Esfera (año VI, n.o 305, I-XI-1919) donne à lire, sous le titre Cubismo literario, un fragment du Don Juan de Max Jacob , « Historia de don Juan» avec les deux premiers chapitres traduits. Cette traduction est à coup sûr du même auteur que l’analyse critique qui précède les textes. Il s’agit de José Francés (1983-1964), écrivain habituel de La Esfera, connu comme critique d’art et traducteur et qui signe J. F. Dans sa brève analyse précédant la traduction des chapitres I et II, J. Francés cite les Don Juan de Tirso de Molina, de Molière, de Byron, de Zorrilla, œuvres célèbres dira-t-il, alors que le Don Juan jacobien qui mériterait – toujours selon Francés – d’être lu et connu n’a pas encore eu cette fortune outre-Pyrénées. Le critique signale par ailleurs que l’expression « cubisme littéraire » a son équivalent en Espagne sous le nom de « ultraísmo »(17). Il fait également allusion aux revues françaises les plus avant-gardistes de l’époque, et il termine en soulignant l’excentricité et l’extravagance du Don Juan de Max Jacob, ce que les lecteurs de la revue pourront apprécier en lisant les deux chapitres traduits. Sur la même page et sous le même intitulé de « Cubismo literario » apparaît un dessin du caricaturiste espagnol K-Hito(18) en correspondance avec la thématique cubiste que propose la revue.

En mai 1919, Guillermo de Torre donnait également sa « Traducción de ‘Prosas’ de Max Jacob », dans la revue Grecia(19). Et c’est aussi en 1919 que Enrique Díez-Canedo publie un poème de Max Jacob dans la revue España(20) sous le titre de « Poetas modernos » qui regroupe plusieurs auteurs. Il s’agit du poème « Anécdota inverosímil » / « Anecdote invraisemblable »(21). Dans la même rubrique, Díez- Canedo propose également la traduction d’un poème de l’Allemand Arno Holz, de l’Italien Giuseppe Lipparini, de Jules Romains et des Anglais Wilfred Wilson Gibson et Richard Aldington. Chaque poème est précédé d’une très brève notice bio-bibliographique de l’auteur. Ainsi, on peut lire « Max JACOB (Français, né en 1877 (sic)). Un des paladins de “L’esprit nouveau” » avec Apollinaire, Blaize (sic) Cendrars, P. Reverdy, Albert-Birot, etc. ». Le poème choisi, « Anecdote invraisem- blable », ferait partie de deux poèmes en prose reproduits en 1908 dans « Une conférence d’Apollinaire, La Poésie symbolique en 1908 » (Conférence de « La Phalange nouvelle » 25 avril 1908, au salon des Artistes indépendants)(22).

C’est incontestablement dans la revue Cosmópolis (1919-1922) que le nom de Max Jacob apparaît le plus souvent. Sans être de tendance « ultraiste », Cosmópolis publie des articles critiques et des essais sur la littérature d’avant-garde signés R. Cansinos-Assens, et G. de Torre. Dans le no 5 de 1919 (p.73-74), Cansinos- Assens met en valeur la préface du Cornet à dés dont il cite des fragments. Dans le no 20 de 1920 l’article de G. de Torre qui porte sur « La poesía creacionista y la pugna entre sus progenitores » (la poésie créationniste et la bataille entre ses progéniteurs, p. 20-29-31), fait également allusion à Max Jacob et au Cornet à dés, et, dans le no 21 de 1920, c’est La Défense de Tartufe qui est mentionnée. Le no 36 de Cosmopolis XII de 1921 consacre, quant à lui, huit pages à Max Jacob, de la main de G. de Torre, dans la section « Los poetas cubistas franceses ». L’attaque invite à mieux connaître notre poète: « Max Jacob est-il cubiste ? ». G. de Torre commente brièvement chacune des œuvres de Max Jacob publiées avant 1921, et propose en traduction plusieurs poèmes du Cornet à dés dont la plupart appartiennent à la série des aphorismes(23). Il termine avec la traduction du poème « Ma vie en trois lignes »(24). On constate que G. de Torre qui, rappelons-le, fera publier El cubilete de dados en 1924, avait déjà traduit plusieurs poèmes de Max Jacob et les avait fait connaître dès 1921, des poèmes que de Torre avait pu lire dans des revues françaises avant la parution du Cornet.

Le 10 juillet 1920, une page entière est consacrée à « La exposición Max Jacob » (rubrique : « Desde París) dans la revue La Esfera. Il s’agit ici d’une présen- tation du Max Jacob en tant qu’auteur de gouaches exposées chez Bernheim Jeune dont 4 sont reproduites : L’Opéra, Les Boulevards, La Seine, La Cité. Le portrait de Max Jacob figure au centre de la page. Le signataire de la rubrique, Darius-Frosty, fait l’éloge de l’auteur de ces gouaches et termine sur cette phrase : « On ne s’étonnera pas que M. Max Jacob soit ce que l’on appelle aujourd’hui un génie ».

Max Jacob collaborera à d’autres revues dont Grecia (Séville-Madrid) et, en 1924, à la revue ultraiste Tobogán dirigée par Manuel de la Peña, une revue de brève durée qui ne comptera pas plus de trois numéros. Nous l’apprenons par le quotidien indépendant madrilène Heraldo de Madrid du 10/10/1924, (p. 5).

En 1928, la une de La Gaceta Literaria(25) – numéro de « Semana Santa » (Pâques) est consacrée à la rubrique Catolicismo y literatura. Le « Poema místico » (« Poème mystique ») de Max Jacob y figure, accompagné d’un dessin à la plume représentant l’Annonciation. D’autres articles sur la mystique espagnole, la littérature sociale catholique en Espagne, ainsi qu’un article critique de l’ami José Bergamín intitulé « Ni arte ni parte » accompagnent le poème jacobien et le dessin(26). Le poème mystique dont on ignore le nom du traducteur avait paru dans Cahiers d’Art no 2, dans le dossier « Idéalisme et naturalisme dans la peinture moderne » de 1928. Il était accompagné de quatre dessins mystiques : La Résurrection, La Pêche miraculeuse, La Vierge, L’Annonciation. C’est L’Annonciation qui a été retenue dans La Gaceta Literaria.

En 1934, comme nous l’avons déjà évoqué, c’est le catholique libéral José Bergamín qui publiera dans Cruz y Raya les textes jacobiens sur le thème religieux.

COMMENTAIRES CRITIQUES SUR MAX JACOB ET ALLUSIONS À SON ŒUVRE

Les revues littéraires de l’époque couvrent une des périodes intellectuelles les plus brillantes de la littérature espagnole. Ces années qui vont de 1898 à 1936 seront appelées « La Edad de Plata » (L’Âge d’argent) et se décomposent en trois étapes : Modernisme, « Novecentismo (generación de 1914) » et « Generación del 27 ». Elles nous apportent des commentaires précieux sur Max Jacob et la réception de son œuvre dans la langue de Cervantès.

En 1917, Corpus Barga fait allusion à Max Jacob, dans sa chronique parisienne publiée dans le quotidien madrilène La Correspondencia de España(27) à propos du spectacle des ballets russes Parade, de Serge Diaghilev (mai 1917). Le journaliste Corpus Barga(28), qui avait fui l’Espagne pour se fixer à Paris, rendait compte de la vie culturelle parisienne dans plusieurs journaux espagnols. Ayant lui-même assisté à Parade (fruit d’une collaboration tripartite entre Jean Cocteau, Léonide Massine et Pablo Picasso, avec une musique de Satie), il commente(29) :

[...] Le monde hétéroclite et artistique de Montparnasse descend aussi au Châtelet. Entre-temps, Picasso se trouve dans un restaurant tout proche avec Cocteau et Jacob. Ce monsieur Jacob, ami intime de Picasso, est un poète fran- çais, toujours ultramoderne et qui a vu ses cheveux blanchir avant de voir sa tête couronnée de lauriers. C’est un héros bouffon et bohème, capable de se laisser pendre pour faire une grimace grotesque [...]
Max Jacob veut faire des réserves mentales et commence à démontrer la trans- cendance de l’introduction de Managers en bois dans le ballet. Picasso a la pudeur de ne pas parler d’art. Et les Managers en bois que mentionne Jacob sont déjà prêts à apparaître sur scène. Le moment de Parade est venu.
Et voici le rideau décoré par Picasso. Il n’a rien de cubiste ni de particulier (...) un danseur apparaît sortant d’un énorme Manager cubiste en bois. Manager est une façon de parler. Son enveloppe est formée de plans multiples : bras, pieds, canne, pipe, escalier et façade de maison. Soit, moitié décoration, moitié person- nage. Tout en noir. Et il danse – naturellement – uniquement avec les pieds.

C’est encore Guillermo de Torre qui présente Max Jacob dans la revue madrilène Ultra du no 20 du 15-12-1921, (p. 3), dans un article intitulé « Los nuevos valores literarios franceses: Max Jacob ». G. de Torre met ses lecteurs en garde contre l’apparente facilité des textes jacobiens dont le ton semble familier : « L’opinion que l’on se fait tout d’abord de Max Jacob est celle qui le tient pour un auteur difficile, bien plus compliqué que ne le promet la familiarité du ton, à première vue. »(30)

La même page de l’Ultra propose un commentaire non signé de la conférence prononcée par le poète chilien Huidobro (1893-1948) à « l’Ateneo », prestigieuse institution culturelle madrilène. La conférence portait précisément sur le sujet « Estética moderna” qui met en lumière “l’Esprit nouveau”. Rappelons que Huidobro qui a énormément contribué à la diffusion des idées avant-gardistes françaises en Espagne(31) était apprécié de Max Jacob. L’auteur lui écrira une dédicace sur le Cornet à dés de 1917 :

Au poète Vicente Huidobro qui a inventé
                        la poésie moderne sans connaître les résultats de l’effort européen
et dont la place parmi nous était déjà rêvée

En 1924, Antonio Marichalar qui sympathisait avec les auteurs catholiques français écrit, dans le supplément littéraire du no 6 de La Verdad(32), un article intitulé « Max Jacob : cubista y católico » qui se fait l’écho de la sortie du Disque vert, numéro spécial entièrement consacré à Max Jacob. Marichalar fait allusion à « une légende qui protège [Max Jacob] et à une estimation unanime qui obligent à le vénérer ». Il signale ce qu’il appelle les deux facettes antagonistes du poète : « cubiste et catholique », tout en rappelant le côté original de son œuvre poétique et de son « Art poétique ». L’article est rédigé à Madrid, comme l’indique l’auteur à côté de sa signature.

En 1925, Guillermo de Torre publie un ouvrage très éclairant sur les littératures européennes d’avant-garde intitulé Literaturas europeas de vanguardias(33). Il consacrera quatre pages à Max Jacob, dans le chapitre III qui présente les poètes cubistes français (partie intitulée « Anthologie »). Jacob y figure à côté d’Apollinaire, Cendrars, Cocteau, Radiguet, Morand, Salmon, Beauduin, Drieu la Rochelle et Albert-Birot). Guillermo de Torre reprend en grande partie et presque textuellement son article de 1921 publié dans le no 12 de Cosmópolis (voir plus haut) qui commençait par la même attaque (première phrase) : « Max Jacob est-il cubiste ? ». De Torre, qui parle d’un poète « classique » et d’un prosateur « baroque », reprend à son compte de nombreux commentaires d’Henri Hertz, de Cocteau, de Cassou, mais donne également son point de vue critique sur l’auteur dont il cite les œuvres : Saint Matorel, Le siège de Jérusalem, La côte, Les alliés sont en Arménie, Le Cornet à dés, Le Phanérogame, La Défense de Tartufe, L’Art poétique, Cinématoma, Le Cabinet noir et Le Laboratoire central, et insiste sur la nouvelle esthétique de création que Jacob condense dans le prologue du Cornet à dés et Art poétique et dont de Torre cite des passages, mais ne donne aucun poème en traduction.

En 1934, le quotidien Heraldo de Madrid publie le 14 juin 1934, dans sa rubrique « Literatura » (p. 6), un entrefilet sur le livre d’aphorismes de José Bergamín, La Cabeza a pájaros, signé Miguel Pérez Ferrero. Bien que l’article ne parle pas de Max Jacob, l’auteur y apparaît sur une photo prise à Madrid en compagnie de Bergamín. Cette photo coupe l’entrefilet consacré à Bergamín en deux parties. Sur cette même page, on peut lire une brève non signée, intitulée « Cubilete de dados » sous-titré « Quevedo et ses amis ». Le texte signale la consti- tution à Madrid du groupe d’intellectuels « Los amigos de Quevedo »(34). Le nom de Max Jacob n’apparaît point, mais le titre n’en est pas moins un joli clin d’œil au Cornet à dés. La même page du quotidien offre une rubrique de Pedro Garfías sur l’ultraisme.

ŒUVRES TRADUITES DANS DES ANTHOLOGIES

Outre sa diffusion dans les revues littéraires de l’époque, Max Jacob a également été publié dans des anthologies. Celle de Enrique Díez-Canedo est, à coup sûr, la plus intéressante à ce sujet. Membre de l’Académie espagnole de la langue, grand critique littéraire espagnol, poète et traducteur, Díez-Canedo a compris très tôt l’importance des idées jacobiennes et de son art poétique. Il a souhaité les faire connaître en procédant à une sélection de poèmes qu’il a traduits et publiés dans La poesia moderna francesa : Antología ordenada y anotada, une anthologie préparée en collaboration avec Fernando Fortún et publiée à Madrid en 1913. La guerre civile l’obligera à s’exiler au Mexique où il sera professeur à l’U.N.A.M. Il complétera alors son anthologie (sans la collaboration de Fortún qui meurt en 1914), ajoutant deux nouveaux chapitres dont l’un consacré aux poètes modernes. C’est dans cette deuxième édition que figure Max Jacob. Malheureusement, ni Díez-Canedo son auteur-compilateur, ni Max Jacob ne verront la publication de l’anthologie de 1945 (tous deux mourront en 1944)(35). Díez-Canedo y consacrera plusieurs pages à Max Jacob : une présentation suivie de la traduction (de sa propre plume) de poèmes empruntés(36) au Cornet à dés, au Laboratoire central, à Ballades, aux Pénitents en maillots roses, à la Défense de Tartufe et aux Visions infernales(37). Enrique Díez-Canedo était non seulement un grand connaisseur de la littérature française contemporaine (ayant séjourné à Paris, il avait noué des amitiés avec plusieurs intellectuels dont Paul Valéry), mais également un critique de marque et un traducteur chevronné. L’article « La traducción como arte y práctica » (traduction, art et pratique) que publiera le quotidien argentin La Nación en 1929 est d’une grande valeur théorique pour comprendre les idées développées par cet auteur espagnol à partir de sa propre expérience en traduction poétique(38).

DES TRADUCTIONS DE POÈMES PERDUES À JAMAIS

Au cours de nos recherches nous avons vérifié que plusieurs auteurs ont pu traduire Max Jacob de son vivant, en Espagne, mais les textes n’ont pas toujours été publiés ou, parfois, ils n’ont pu être retrouvés. Ainsi Juan Ramón Jiménez (1881- 1958), l’une des plus prestigieuses figures de la lyrique espagnole pour qui le fait poétique se confondait avec le sacré, possédait dans sa bibliothèque sept ouvrages de Max Jacob publiés entre 1920 et 1923(39) ; le poète andalou de la « poésie pure » considérait d’ailleurs Max Jacob comme l’un des poètes français les plus remarquables de l’époque. Soledad González Ródenas(40) signale que le poète de Moguer aurait même traduit plusieurs poèmes de Jacob, mais que, malheureu- sement, et bien que Juan Ramón Jiménez ait affirmé avoir traduit des poèmes de cet auteur, il n’existe, à ce jour, aucune trace de leur publication.

TRADUCTIONS POSTHUMES

Seules trois œuvres intégrales seront traduites en Espagne – en langue espagnole et en galicien – ainsi qu’une correspondance, Cartes a Togores, dans une édition bilingue (français-catalan) en 1998. Il s’agit de :

  • Conseils à un jeune poète suivis des Conseils à un étudiant/Consejos a un joven poeta, seguidos de consejos a un estudiante, traduit par José Antonio Millán, en 1976(41) ;
  • Histoire du roi Kaboul.../ Historia do rei Kabul I e do pinche Galván, traduit (en galicien) par Harguindey Banet Henrique & Arana Xesús María en 1999(42) ;
  • Miroir de l’astrologie/ Espejo de astrología, traduit par Joaqui Juncà y Cristóbal Serra, en 2005(43) ;
  • enfin, une réédition du Cubilete de dados a vu le jour à Buenos Aires et à Madrid en 2006 chez éd. Losada, comme nous l’avons déjà signalé.

Plus récemment, de brefs articles critiques sur le poète, son œuvre poétique et picturale font l’objet de publications dans les journaux nationaux, comme ce papier d’Emilio Gasco Contell « Max Jacob, poeta, pintor y bohemia de Montmartre » qu’on peut lire dans le quotidien espagnol ABC 12-12-1971, (p. 15) et qui reproduit une page manuscrite des Méditations chrétiennes de l’auteur où l’on peut voir aussi une photo de Picasso devant l’une de ses céramiques(44).

Federico Revilla publiera en 1960 un opuscule de 31 pages consacré intégralement à l’auteur du Cornet à dés : Max Jacob : la fuerza que atrae(45). Revilla, journaliste et écrivain qui ne cache pas son admiration pour le poète, narre la vie de Max Jacob en respectant scrupuleusement la chronologie : de l’enfance quimpéroise aux derniers jours à Drancy. La narration est amène. Le texte est court et orienté vers un souci de divulgation que favorise la souplesse d’une syntaxe exempte de toute rhétorique. Revilla insiste tout particulièrement sur le parcours tourmenté de l’homme de foi, de l’artiste et du poète. Le livre a été soumis à la censure ecclésiastique au moment de sa parution à Barcelone en 1960.

De l’autre côté de l’Atlantique, nous trouvons également la trace de quelques traductions au Mexique, en Argentine, au Venezuela, ainsi que des hommages (en Argentine).

Au Mexique, on signalera Salvador Novo (1904-1974), co-éditeur de la revue Úlises, revista de curiosidad y crítica, la première revue mexicaine qui publiera des textes d’un grand nombre de poètes français, anglais et américains. Max Jacob contribue à la revue avec deux poèmes en français, « La statue » et « Torticolistalie » dans le premier numéro de mai 1927. De courte durée, Úlises (1er mai 1927- fév. 1928) s’éteindra après 6 numéros.

En 1957, « La mendiante de Naples » et « Encore Fantomas » sont traduits et intégrés sous forme de contes dans Cuentos breves y extraordinarios. Antología, de Jorge L. Borges et A. Bioy Casares(46). Ces mêmes poèmes en prose étaient déjà inclus dans le Cubilete de dados par G. de Torre. Celui-ci respectera le titre original des deux poèmes tandis que J. L. Borges et A. Bioy Casares optent pour le changement du titre de « Encore Fantomas » et lui préfèrent « El cocinero » (Le cuisinier), ce qui leur permet d’annoncer le thème du poème. Là encore, il serait intéressant de gloser sur les différences notables entre les traductions faites par de Torre ou celles de Borges et Bioy Casares dans leur anthologie, mais ce travail, plus centré sur les variantes traductologiques dans les textes de Max Jacob publiés en langue espagnole, déborderait le cadre de notre contribution. Il mérite toutefois qu’on s’y intéresse.

Pour ce qui est des hommages, nous mentionnerons le poète argentin Oliverio Girondo (1891-1967) qui inclut « Paisaje Bretón » dans son recueil de poèmes de 1922 : Veinte poemas para ser leídos en el tranvía & calcomanía, publié par Losada à Buenos Aires en 2007, avec un prologue de l’écrivain Enrique Molina qui rappelle l’itinéraire français du poète argentin, lequel avait séjourné à Douarnenez et à Brest en juillet et août 1920 respectivement (p. 31-32). Le poème est accompagné d’un dessin de la main de Girondo qui était également peintre ; il représente trois marins apparemment bien gais. Le poème commence par ces vers que nous donnons en traduction(47) :

Douarnenez,
D’un coup de dés
retient comme un marais
parmi les dés de ses maisons
un morceau de mer

à odeur de sexe qui fait tomber...

Barques blessées, échouées, aux ailes repliées !
Tavernes chantant d’une voix d’orang-outang !
Sur les quais
brillants sous les poissons
se tiennent les marins bras-dessus, bras-dessous.

La revue argentine d’avant-garde Poesía Buenos Aires, dont le poète Raúl Gustavo Aguirre (1923-1983) sera le co-fondateur à partir de 1950, publie des textes de poètes de « L’Esprit nouveau » dans ses numéros 13 et 14, puis lance en 1950 une série d’éditions dans la collection « Poetas del siglo XX » où Max Jacob figure à côté d’Apollinaire et d’Éluard.

La revue argentine Poesía (« de poésie et de théorie poétique ») dirigée par le poète, essayiste, critique et traducteur Alejandro Oliveros donne, dans le no 1 de 1971, une traduction d’un poème de Max Jacob « Amor al prójimo », « Amour du prochain » extrait de Derniers poèmes, 1941, de la main de Oliveros lui-même. Le même numéro de 1971 publie un poème de Raúl Gustavo Aguirre intitulé « Poesía ».

Un autre hommage nous vient du poète Argentin Alfonso Sola González (1917- 1975), un des plus célèbres représentants de la lyrique argentine qui, comme Max Jacob, a souffert de persécutions(48). Dans son élégie funèbre « Ici Repose Max Jacob »(49), le poète argentin interpelle le poète breton depuis la fosse commune où fut d’abord enterré « l’Ange foudroyé ». Sala González accompagne son poème d’une reproduction de Notre Dame de Fleury et indique que Max Jacob priait devant cette image de la Vierge. Nous transcrivons la première et la dernière strophe du poème(50).

ICI REPOSE MAX JACOB
1876-1944

En Ivry son nuevas las tumbas; nueva la distribución de la muerte
Nuevos los visitantes. Todo es nuevo en Ivry.
Los fusilados hacen lugar a Max Jacob ;
“Caliéntate Max. Eres un pobre judío
y tienes frío otra vez. Los caballos no te acompañaron
ni las cornetas sonaron alegremente en tus funerales.”
Un pájaro tiene el nombre de Ayer. A veces canta
para los fusilados de Ivry.
Nada reluce demasiado, pero todo es nuevo
como el ala de la mañana
cuando quema los bosques de la tierra.
¿Cómo será un cementerio desconocido,
una piedra color de abadía
en el cementerio de Ivry?

À Ivry nouvelles sont les tombes ; nouvelle la distribution de la mort
Nouveaux les visiteurs. Tout est nouveau à Ivry.
Les fusillés font de la place à Max Jacob ;
« réchauffe-toi Max. Tu es un pauvre Juif
Et tu as froid encore une fois. Les chevaux ne t’ont pas accompagnés
Et les clairons n’ont pas sonné allègrement non plus lors de tes obsèques. »
Un oiseau porte le nom d’ Hier. Parfois il chante
Pour les fusillés d’Ivry.
Rien de reluit vraiment,
mais tout est nouveau
Comme l’aile du matin
Lorsqu’elle brûle les forêts de la terre.
Comment sera un cimetière inconnu,
Une pierre couleur d’abbaye
Dans le cimetière d’Ivry ?

.../...

Los visitantes dicen los domingos:
“Aquí yace Max Jacob, el judío que veía al Señor.”
Es la misa del frío en Saint-Benoît-sur-Loire.
Haces sonar la campanilla, ¡oh Buen Ladrón!,
y la harina del día relumbra en los altares.
Las cuevas de la muerte son estrellas con leones ardiendo
donde se quema el polvo de los Jueces.
Y tienes frío y tiemblas.
¡Cómo fulgura el carro de los ángeles, cómo brillan
las barbas de los santos, hermosas como lanzas!
El niño de Ivry tiene miedo.
“Ah Max, qué tonto eres”, dice la Santa Virgen.

Les visiteurs disent le dimanche:
« Ici gît Max Jacob, le Juif qui voyait le Seigneur. »
C’est la messe du froid à Saint-Benoît-sur-Loire.
Fais sonner la clochette, Oh bon Larron !,
Et la farine du jour reluit sur les autels.
Les grottes de la mort sont des étoiles avec des lions ardents
Où l’on brûle la poussière des Juges.
Et tu as froid et tu tremble.
Comme il resplendit le char des anges, comme elles brillent
Les barbes des saints ; belles comme des lances !
L’enfant d’Ivry a peur.
« Ah Max, comme tu es bête », dit la Sainte Vierge.

En fouillant davantage dans la correspondance des poètes outre-Atlantique, on trouve la trace de liens – épistolaires sinon personnels – de nombre de ces écrivains et peintres de langue espagnole qui appréciaient Max Jacob. Les noms du peintre mexicain Lazo, du poète équatorien Alfredo Gangotena (1904-1944) ou encore celui du péruvien Manuel Gálvez peuvent être cités.

Lazo a malheureusement demandé de détruire toute sa correspondance après sa mort. Les poèmes « Torticolistalie » et « La Statue » ont été publiés dans la revue mexicaine Úlises en 1927. Le 14 octobre 1925, Max Jacob avait demandé à Agustín Lazo de traduire le poème « La Statue »(51).

Alfredo Gangotena, dont l’œuvre poétique est en majeure partie écrite en français, était arrivé à Paris à l’âge de 18 ans. Il rentre en Équateur à 23 ans. Sa poésie avant-gardiste d’inspiration mystique était appréciée de Max Jacob qui lui écrira quelques lignes, sur un ton pessimiste, à propos de son recueil Absence 1928- 1930 (rédigé en français à Quito, en 1932) : « Época trágica que requiere una poesía trágica, una desgarradora época de poetas desgarrados (« Une époque tragique qui exige une poésie tragique, une époque déracinée de poètes déracinés)(52). Gangotena dédie son poème « Arc-en-ciel » (dans la série « poèmes variés »(53)) à Max Jacob.

De Manuel Gálvez, on a la preuve d’une correspondance avec Max Jacob qui, une fois de plus, montre l’intérêt pour la production poétique de la part de ses pairs d’Amérique latine. La carte postale date de 1930. Max Jacob écrit :

Cher confrère ami.

Il faut que je vous conte l’histoire du volume que vous m’avez envoyé. Il est arrivé pendant les vacances : j’étais absent. Or pendant les vacances règne dans la maison un jeune prêtre savant ; il a vu un livre ; il a ouvert le paquet, il a emporté le livre !! Hier ce jeune prêtre arrive à Saint Benoît pour les vacances du 11 novembre (anniversaire de la guerre). Il vient me voir et me déclare qu’il a lu cet été un livre admirable : L’Ombre du cloître.
« Ou (sic) avez-vous trouvé ce livre ? lui dis-je avec empressement.
— Bah ! il est ici chez vous ! Je l’ai posé dans la bibliothèque. Nous fouillons ! Je me jette sur « l’Ombre du cloître » et avant de l’avoir fini, je bondis sur cette carte : admirable livre en vérité. Aussitôt que je l’aurai fini je vous écrirai mon ravissement. Je pense provisoirement que c’est un chef-d’œuvre. Nous verrons. Amicalement mes deux mains Max Jacob

CONCLUSION

Cette étude sur la réception de Max Jacob en espagnol ne peut être exhaustive. Les brèves incursions dans les revues et anthologies nous confirment néanmoins que l’œuvre jacobienne a fait date outre-Pyrénées et au-delà de l’Atlantique. Les collabo- rations de Max Jacob aux revues littéraires espagnoles au début du XXe siècle y sont pour beaucoup. On notera toutefois que si cette présence est relativement marquée du vivant de l’auteur, elle n’a pas eu la même fortune durant la seconde moitié du XXe siècle, après la mort du poète. Les œuvres en prose ne sont guère traduites, elles ne font pas non plus l’objet de commentaires critiques dans des revues spécialisées. Force est donc de constater que c’est la poésie jacobienne, et tout particulièrement Le Cornet à dés de 1917, ainsi que quelques poèmes appartenant à d’autres recueils (voir supra), qui ont été retenus pour leur diffusion en traduction par des auteurs (poètes pour la plupart) de langue espagnole, entre 1910 et 1935. La prégnance poétique du Cornet avec son illustre préface est donc incontestable ; c’est un référent pour ces poètes avides de rupture dont le regard était tourné vers la France. Celle-ci leur apportait, avec la poésie d’avant-garde, le vent frais à la fois libérateur et rénovateur qui allait mettre en ébullition les nouvelles revues littéraires(54).

Si la poésie jacobienne a intéressé les auteurs de langue espagnole en ce début du XXe siècle, les œuvres en prose comme Le Terrain Bouchaballe, Filibuth ou la montre en or, Le Roi de Béotie, Le Cabinet noir, la trilogie de Saint Matorel, L’Homme de chair et l’homme reflet n’ont pas retenu leur attention. N’oublions pas que d’autres vents vont souffler avec l’arrivée de la « generación del 27 » : la grande poésie espagnole va alors renouer avec la tradition populaire et Góngora(55).

Un travail immense de diffusion de l’œuvre jacobienne, poétique et romanesque reste à faire dans la langue de Cervantès et, au-delà des poèmes du Cornet à dés, c’est aussi Visions infernales, Le Laboratoire central, Les Pénitents en maillots roses qui demandent à être traduits intégralement. À l’instar des initiatives anglo-américaines, allemandes, italiennes et russes, pourquoi ne pas commencer par des anthologies qui donneraient le meilleur de la production jacobienne ? Il serait souhaitable que des maisons d’édition prennent cette initiative de diffusion, afin de mettre en lumière l’œuvre de Max Jacob, par le biais de la traduction, sans plus tarder.

Nous terminerons avec cette phrase de Enrique Díez-Canedo : « Je crois fermement à la possibilité de traduire. Tout grand écrivain est finalement traduit, non seulement par ceux qui s’appliquent à le reproduire dans une autre langue, mais par ceux qui ressentent son influence. Traduire équivaut à se donner... »(56) On comprend que Max Jacob fut un grand écrivain pour Díez-Canedo qui choisit de traduire très tôt nombre de ses poèmes.


* Professeur de traduction à l’université de Las Palmas de Gran Canaria (ULPGC), Espagne, Marie- Claire Durand Guiziou enseigne à la Facultad de Traducción, Interpretación y Comunicación depuis 1988.

NOTES

1 — Pour plus de détails sur cette amitié et le rapprochement avec l’Espagne, nous renvoyons à notre article « Max Jacob et l’Espagne: introduction » dans le dossier sur « Le voyage en Espagne », Les Cahiers Max Jacob n° 7, 2007, p. 11-31.

2 — Max Jacob s’est rendu en Espagne au moins à deux occasions, sinon plus. En 1913 en Catalogne et en février 1926 à Madrid et Tolède ; il donna une conférence – improvisée selon lui – et intitulée « sans motif », à la prestigieuse Residencia de Estudiantes de la capitale qui fut fort appréciée.

3 — C’est en Colombie que le Catalan Ramón Vinyes fera connaître des textes de Max Jacob dans la revue Voces qu’il fonda à Barranquilla dans les années 1917- 1920.

4 — Ce sont les courants les plus représentatifs de l’avant-garde espagnole.

5 — À partir de 1936, des intellectuels espagnols des plus brillants choisiront l’exil vers des pays du nouveau continent et continueront outre-Atlantique leur production littéraire, contribuant ainsi à promouvoir les idées avant-gardistes.

6 — Guillermo de Torre est né à Madrid en 1900 et décédé à Buenos Aires en 1971. Poète, essayiste, critique littéraire, il a co-dirigé les revues La Gaceta Literaria (1927) et Índice Literario (1932). Il fut également professeur de littérature à l’université de Buenos Aires. Comme son beau-frère Borges, il terminera ses jours pratiquement aveugle. De ses nombreuses publications – de Torre est un écrivain prolifique –, on retiendra surtout ses œuvres sur l’avant-garde littéraire : Literaturas europeas de vanguardia de 1925, avec une réédition revue et complétée en 1965. De Torre est à coup sûr le grand chantre des idées avant-gardistes qu’il a défendues sous le nom de Ultraísmo – l’École de « l’Ultra » (« l’au-delà ») –, nom qu’il se targuait d’avoir inventé, même si Cansinos-Assens l’avait fait avant lui. Certains de ses contemporains, dont le poète Gerardo Diego, le surnommèrent Guillaume de la Tour pour la grande admiration qu’il professait à l’égard des poètes avant-gardistes français.

7 — JACOB Max, El cubilete de dados, traducción de Guillermo de Torre, Madrid : Editorial América, Biblioteca de autores célebres, 1924.

8 —Au sujet de la traduction El Cubilete de dados de 1924, nous renvoyons à notre article in Babel 51 n° 3, 2005, p. 238-261.

9 — Des poèmes publiés dans des revues françaises comme Nord-Sud étaient repris et traduits dans les revues espagnoles de l’époque.

10 — Biblioteca Nueva, Madrid, 1930, 199 p.

11 — Voir ROULLIÈRE Yves dans Les Cahiers Max Jacob n° 7, 2007, note no 15, p. 66.

12 — Voir SCHMITT-KUMMERLEE Philippe, « Un manuscrit retrouvé, Vrai sens de la religion catholique », Les Cahiers Max Jacob n° 7, 2007, p. 85-93.

13 — Qui serait d’origine juive sans que l’on puisse le confirmer. Toutefois, l’auteur lui-même s’en est vanté, et l’on sait qu’il défendait la cause des Séfarades.

14Max Jacob, el travieso humorista, compone un poema, de tonalidades barrocas, como una antigua balada, en el que recoge un tema de Le Cornet à dés, el incendio es como una rosa abierta en la cola de un pavo real; titúlase: La calle de Ravignan.

15 — Dont voici le premier vers : « Importuner mon Fils à l’heure où tout repose ».

16Dans Le Cornet à dés (1967 : 55) : « Un incendie est une rose sur la queue ouverte d’un paon ». C’est nous qui soulignons pour signaler un changement dans l’ordre des mots.

17 — Comme nous l’avons signalé, le mot « Ultraísmo » aurait été inventé par Cansinos-Assens, mais Guillermo de Torre en aurait aussi revendiqué la paternité. Pour plus d’information sur le rappro- chement entre l’ «Ultraísmo » espagnol et l’avant-garde artistique de l’époque, on consultera le livre de Gabriela Morelli (coord.) Treinta años de Vanguardia española, Gabriela Morelli coord., Sevilla, El Carro de la Nieve, 1991, où on peut lire : « L’Ultra se nourrit de Nietzsche, d’Annunzio, Walt Whitman, Emerson, Verhaeren, Marinetti, Apollinaire, Mallarmé, Tzara, Max Jacob, Picabia, Cocteau, de la revue Nord-Sud, et de Vicente Huidobro ». (p. 98, c’est nous qui traduisons).

18 — Pseudonyme de Ricardo García López (1890-1984), écrivain, caricaturiste et éditeur (proche de la célèbre Generación del 27).

19Grecia, 20 mai 1919, p. 16 et 21 respectivement. Il existe une édition en fac-similé de José María Barrera López : Centro Cultural de la Generación del 27 y Área de Cultura de la Diputación de Málaga, Málaga, 1998, p. 1-21 : « Novísima Literatura Francesa. Prosas de Max Jacob. “Poema en forma de hilo enredado” », traducción de G. de T.

20España,V,n°220,p.10,26-VI-1919.

21 — « Mon frère l’Africain... ».

22 — Cité par Pierre Andreu dans Vie et mort de Max Jacob, Paris : La Table ronde 1982, p. 53-54.

23 — « Je me déclare mondial... », « Ses bras blancs... », « Un incendie ... », Un buisson d’épines bleu pâle... », « Pour se venger de l’écrivain... », « Brouillard, étoile d’araignée », Au pied du lit... » « Sautez à la corde en descendant les escaliers... », « Murs de briques, bibliothèque », « Les alvéoles d’un interminable New York », « Le jeu de dominos... », entre autres.

24 — Il s’agit d’un poème paru dans Action, cahiers de philosophie et d’art, no 4, (juillet 1920, p. 1) qui a été réédité chez Jean-Michel Place en 1978.

25 — Année II, no 31, 1-04-1928.

26 — Rappelons que José Bergamín favorisera la publication de poèmes de Max Jacob en Espagne. Se référant aux publications déjà citées de Cruz y Raya, Max Jacob s’en vantera dans une lettre à Marguerite Mespoulet : il écrit le 10 décembre 1934 : “J’ai pu placer en Espagne des articles importants”, en référence aux textes traduits par Bergamín dans la revue sous sa direction.

27 — Année LXVIII, 13-06-1917, p. 7.

28 — De son vrai nom, Andrés García de Barga y Gómez de la Serna.

29 — Nous ne traduisons que la partie de l’article qui concerne Max Jacob.

30Max Jacob destaca liminarmente de nuestras miradas valoradoras como ‘un autor difícil’, más complejo de lo que a primera vista promete la familiaridad de su tono.

31 — V. Huidobro arrive en Espagne en 1918 après un séjour à Paris. Il sera le fondateur du « Creacionismo » avec Juan Larrea et G. Diego.

32 — Année II, Murcia, 10-02-1924.

33 — TORRE Guillermo de, Literaturas europeas de vanguardia, Madrid : Caro Raggio, 1925. Nous avons consulté la nouvelle édition de 2002 : Pamplona : edición de J. L. Calvo Carilla, Urgoiti editores, S.L., 2002, 420 p. (Voir le chapitre III, p. 116-119 sur Max Jacob).

34 — À l’instar de l’association « Los amigos de Cervantes », un groupe d’intellectuels espagnols revendiquait à cette date la figure de Quevedo, un des auteurs baroques des plus brillants du Siècle d’or espagnol.

35 — DÍEZ-CANEDO Enrique & Fernando FORTÍN, La poesía francesa moderna. Antología ordenada y anotada, Madrid, Renacimiento, 1913. DÍEZ-CANEDO Enrique, La poesía francesa del romanticismo al superrealismo : los grandes románticos : los precursores de las tendencias modernas : los parnasianos : los simbolistas : los poetas nuevos : las escuelas de vanguardia, Buenos Aires : ed. Losada, 1945.

36 — Nous indiquons les sigles entre parenthèses pour signaler dans quels recueils se trouve l’original du poème traduit.

37 — En voici les titres : Mi vida / ma vie (CD), Poema / poème (CD), Misterio del cielo / Mystère du ciel (CD), En el bosque silencioso/ Dans la forêt silencieuse (CD), Poemita / petit poème (CD), Visitación / Visitation, Escapatoria / Échappatoire (« Issue », DT), Exhortación / Exhortation (V.I.), Hortelano / Le jardinier (DT), Il se peut qu’un rêve étrange (LC), Madame X (ces deux derniers avec le titre en français dans le texte) (LC), Establecimiento de una comunidad en Brasil / Établis- sement d’une communauté au Brésil (LC), Arco iris / Arc-en-ciel (LB), Non, Mon espoir n’est point... (en français dans le texte) (PMR) et Nocturno /Nocturne (PMR).

38 — Plus tard, le 7 juin 1925, Díez-Canedo publiera également dans La Nación, de Buenos Aires, « Traductores españoles de poesía extranjera » (traducteurs espagnols de la poésie étrangère), c’est dire l’importance qu’il attachait à la traduction qui était la porte ouverte pour faire connaître les travaux des poètes étrangers en ce début de siècle.

39Cinématoma, Le Dos d’Arlequin, Le Laboratoire Central, Matorel en Province. Le Roi de Béotie, Art poétique, Le Cornet à dés.

40 — GONZÁLEZ RÓDENAS Soledad, Juan Ramon Jimenez a traves de su biblioteca. Lecturas y traducciones en lengua francesa e inglesa (1881-1936), Universidad de Sevilla, Secretariado de publicaciones, 2005, p. 83.

41 — Madrid, Rialp, D.L.

42 — IrIndo,Vigo.

43 — Edicions Cort, Palma de Mallorca.

44 — Jorge Monteleone commente l’édition de 2006 du Cubilete de dados dans le supplément culturel du journal argentin La Nación du 22-10-2006, et parle d’une « traduction historique », « d’un livre emblématique » par l’un des fondateurs de l’ultraisme, le poète de Hélices et l’historien des avant-gardes européennes », Guillermo de Torre. Jorge Monteleone proposera un papier identique dans Revista Literaria AZUL@rte de 2006. Son commentaire à propos de la seconde édition du Cubilete est accompagné de la traduction de « Fausses nouvelles, fosses nouvelles ! / « ¡Falsas noticias ! ¡Fosos nuevos ! »

45 — Ediciones Domingo Savio, Barcelona,1960.

46 — BORGES J. L. & A. BIOY CASARES, Cuentos breves y extraordinarios (Antología), 3a edición, Editorial Losada, S.A., Buenos Aires, 1989 (la première édition de 1957 comporte une note préliminaire de 1953).

47 — Girondo a vécu en Europe dès son adolescence. Son préfacier, E. Molina commente que le « déficit entre le désir et son objet, à partir duquel naît l’humour, se traduit par le grotesque dans la poésie de Girondo. Sa passion affamée de l’existence révèle constamment ce contenu de corruption, de décomposition... qui apparaît dès le premier poème de Veinte poemas, sur Douarnenez (où Girondo avait séjourné en juillet 1920) : “Douarnenez, / en un golpe de cubilete,/ empantana/ entre sus casas como dados,/ un pedazo de mar...” »

48 — Son homosexualité le rendait « coupable ». La poétesse argentine Marta Zamarripa, grande spécialiste d’Alfonso Sola González prépare un ouvrage sur l’auteur argentin où elle révèle de nombreux points de convergence avec Max Jacob (sur la vie et l’œuvre des deux poètes). En consultant le site : http://www.autoresdeconcordia.com.ar/nuevositio/c_critica.php?idautor=39&idlibro=999&idcritica=41 (juin 2010), on peut lire un texte de Carlos Marín qui révèle et anticipe les considérations qu’établit Marta Zamarripa concernant le rapprochement entre les deux auteurs et qui sera développé dans le livre que Marta Zamarripa doit publier courant 2010.

49Tres Poemas, publiés à Buenos Aires (ed. Carmina, 1958).

50 — Le texte original en espagnol peut être lu intégralement sur le site : http://hjg.com.ar/blog/2003_05_04_hjg_archive.html (juin 2010)

51 — Voir à ce sujet ISSOREL Jacques, « Lettres inédites à Agustín Lazo (1925-1927) avec un poème retrouvé : La statue / Jacob Max », C.R.M.J., no 2, 1979. Max Jacob écrit en P. S. dans sa lettre du 14-10-1925 : « Je t’engage à traduire [le poème] et mettre la traduction en face au moins la traduction en prose », (p. 51, annexe IV). Le poème devait servir de frontispice pour le catalogue de l’exposition du Mexicain. Malgré nos recherches auprès des instances mexicaines nous n’avons pas pu vérifier si le poème traduit figura finalement dans le catalogue

52 — Cité par CRESPO Luís Alberto : « El desencanto o Alfredo Gangotena », dans A. Gangotena, Poesía, Caracas : Ministerio del Poder popular por la cultura, Fundación Editorial El perro y la rana, (Poesía del Mundo), 2007. p. 10.

53 — Le texte avait été publié à Paris en décembre 1923 dans la revue Intention année 11, no 20. Sources : Ibid., p. 59.

54 — Voir à ce propos l’ouvrage de GALLEGO ROCA Miguel, Poesía importada. Traducción poética y renovación literaria en España (1909- 1936), Almería : Universidad de Almería, Servicio de Publicaciones, 1996.

55 — Ceci est d’autant plus curieux que l’Espagne figure précisément en seconde position après l’Allemagne au classement des pays traducteurs selon l’Index Translationum de l’Unesco. Par ailleurs, selon l’article « El oficio invisible. Traducir en España », publié par le supplément littéraire « Babelia » du quotidien national El País (28-10-2006, p. 2-4), 40 % des livres publiés en Espagne sont des traductions.

56Creo firmemente en la posibilidad de la traducción. Todo gran escritor se ve traducido, no sólo por los que se aplican a reproducir el texto de sus obras en la propia lengua, sino por los que sienten su influjo. Traducir equivale a entregar. Extrait de « La traducción como arte y como práctica », dans La Nación, 16-06-1920, p. 14.


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Édités par l’association des Amis de Max Jacob, LES CAHIERS MAX JACOB — revue annuelle — sont publiés avec le concours du Ministère de la Culture et de la Communication-DRAC Centre, du Conseil Général du Loiret, de  la ville d’Orléans et de Quimper, de la Communauté de Communes Val d’Or-Forêt et du Centre National du Livre.

Les Cahiers Max Jacob sont présents chaque année, en octobre,  au Salon de la revue organisé par ENT’REVUES (espace des Blancs-Manteaux à Paris) grâce à l’aide de Livre Au Centre, agence régionale pour le livre en région Centre.